jeudi, juin 08, 2006

MA FAMILLE CURIE AU 17ème-18ème SIECLES

JEAN CURIE (3ème du nom) - 1636-1714

A MONTBELIARD.
Jean CURIE (3ème) serait né à Montbéliard le 24 décembre 1636, quatrième enfant de Jean CURIE (2ème du nom), le tanneur et d'Anne CUCUEL. Dès 11 ans à la mort de sa mère, il vécut au nouveau foyer de son père et de sa belle-mère Suzanne DUVERNOY au sein de la tannerie familiale.

Le 29 mai 1660, deux mois avant le décès de son père, Jean CURIE (3ème) épousa Suzanne COLIN, la fille aînée de sa belle-mère (n'ayant aucun lien de parenté avec elle). A Montbéliard, sont nés leurs six enfants : Jean-Pierre CURIE (le 5 août 1661); Marie CURIE (le 30 décembre 1663); Henry CURIE (le 18 décembre 1665); Suzanne CURIE (le 7 avril 1671); Anne CURIE (le 31 octobre 1673) et Catherine CURIE (le 18 septembre 1677).

A la mort de son père, Jean CURIE (2ème) qu'est devenue la tannerie ? Pour répondre à cette interrogation, revenons à Suzanne DUVERNOY, sa seconde épouse qui, désormais, devait orienter l'avenir de notre famille CURIE. Qu'était-elle devenue après le décès de son second mari et après le mariage de sa fille, Suzanne COLIN, avec le fils du premier lit de son second mari Jean CURIE (2ème) ? Deux documents nous ont apporté une réponse.

-- Le testament de Suzanne DUVERNOY. Le 4 juin 1677, Suzanne DUVERNOY, alors malade et croyant sa fin prochaine, rédigea son testament selon la structure luthérienne.Nous retiendrons, ici, les paragraphes cinquième, sixième et septième.

Le cinquième paragraphe est spécialement consacré à son fils Nicolas COLIN qui a eu, semble-t-il, un statut familial particulier. En effet, sa mère déclarait à son sujet : "Et comme dès l'aage de deux ans, j'aurois été chargée en divers temps assez rudes et fâcheux, de la nourriture, entretien et éducation de Nicolas COLIN, mon fils que j'aurois eu dans un premier mariage avec fut Jean COLIN son père pour l'hoirie duquel j'auroy encore payé de mes propres biens des debtes assez considérables, à la restitution de quoy je ne pourrois jamais parvenir tous les biens par luy délaissés, ou ceux que le dit Nicolas pourroit espérer de moy n'y pouvoyent suffire, cependant pour le bien de paix, je lui quitte et remets le tout, et ne veux qu'il en puisse être recerché à quelque cause et moyen que ce soit, luy donnant en outre et dabondant une somme de cinquante escus à trois francs pièce, qui leur seroit délivrés en main propre ou à ses enfants et héritiers, moyennant laquelle je veux qu'il se tienne pour content et satisfait de tout ce qu'il pourroit esperer de moy, mesme sans pouvoir recercher mes autes enfants d'aucun compte ny restitution des biens de leur père, puisque comme dit en ma conscience, il n'y en a point, demeurant courte et amère de ceux que je pourrois avoir en l'hoirie de son père. Et en tant il voudroit quereller, inquiéter et molester mes dits enfants, et contrevenir à cette mienne volonté, je veux que les dites remissions n'ayant aucun lieu, l'instituant seulement mon héritier particulier en sa légitime puisqu'ainsy ma plut et me plait".

En 1677, lors de la rédaction du testament de sa mère, Nicolas COLIN, son fils cadet de son premier mariage avec le tanneur, Jean COLIN, avait 36 ans. Il était marié et avait des enfants. Il semblerait qu'il ait alors réclamé à sa mère la part d'héritage qui auait dû lui revenir sur les biens laissés par Jean COLIN, son père, à son décès en 1647, et alors que lui-même, n'avait alors que six ans. On pourrait supposé aussi qu'il avait suspecté sa soeur aînée, Suzanne COLIN, mqariée à Jean CURIE (3ème) et ses deux autres demi-frères, Pierre CURIE et George CURIE, qui à l'époque du testament avaient respectivement 29 et 23 ans, d'avoir cherché à détourner cet héritage à leur profit, et qu'il se soit même montré agressif à leur égard.

Suzanne DUVERNOY remit alors les choses au point. L'héritager de feu Jean COLIN était grevé de dettes importantes qu'elle avait dû éponger sur ses propres biens en s'endettant elle-même. Puis, elle mentionne qu'elle s'est chargée de la "nourriture, entretien et éducation" de son fils Nicolas COLIN, "dès l'âge de deux ans". Néanmoins, dans un souci de paix familiale, elle a tenu quitte Nicolas de tout ce qu'elle aurait pu exiger qu'il lui rembourse; enfin, elle lui lègue à titre d' "héritier particulier" une somme de cinquante écus à trois francs forts de Montbéliard, pour lui-même et pour ses enfants. Alors, qu'il s'en tienne définitivement pour "content et satisfait" sans importuner davantage ses autres enfants.

Le sixième paragraphe est très bref. Suzanne DUVERNOY y déclare léguer à sa petite-fille Marie CURIE (fille de Jean CURIE, troisième) son "lit tel qu'il est, afin qu'elle aye mémoire et souvenir de moy".

Enfin au septième paragraphe, Suzanne DUVERNOY institue pour ses "vrays et légitimes héritiers", Jean CURIE (troisème) et sa fille aîne Suzanne COLIN (notamment, parce que sur leurs propres deniers, ils se sont chargés d'une dette de cent écus que leur mère avait récemment contractée auprès d'un certain Antoine PAREND, et ses deux fils de son second mariage avec Jean CURIE (deuxième) : Pierre et George CURIE, âgés respectivement en 1677 de 29 et 23 ans, et auxquels elle lèguait à chacun un tiers de ses biens "meubles et immeubles."

-- Quel métier, Jean CURIE (troisème du nom) a-t-il exercé à Montbéliard ? S'il est vraisemblable que la tannerie familiale a été gérée par Jean CURIE (troisième du nom) avec sa belle-mère, Suzanne DUVERNOY, après le décès de son second mari, Jean COLIN, en 1660, il est possible de faire l'hypothèse suivante à propos de la vente aux enchères effectuée entre le 27 mars 1693 et le 1er août 1696 : Jean CURIE (troisième) et son épouse, Suzanne COLIN, avaient été entièrement ruinés, puisque la tannerie "située aux Tanneries" entre "Jacques MASSON, teinturier, et les héritiers de feu Marc SCHOR, chamoyeur, bourgeois de Montbéliard, fut adjugée le 27 mars 1693 pour deux cent vingt francs forts à l'Honorable Jacques DELAUNAY, tanneur, bourgeois de Montbéliard" qui devait résider "derrière" la tannerie de Jean CURIE (troisième). Seul, Pierre CURIE, fils aîné du second mariage de Suzanne DUVERNOY, et demi-frère de Jean CURIE (3ème) racheta la maison familiale à un étage de la rue Surleau pour cinq cent cinquante cinq francs forts, ainsi qu'un champ de six quartes (= 37,68 ares) pour trente cinq francs forts. Pourquoi n'a-t-il pas plutôt racheté la tannerie de son demi-frère, laquelle avait été adjugée moitié moins que la maison familiale ? Sans doute, parce que, lui-même tanneur de profession, possédait sa propre tannerie!

Il est donc permis de supposer qu'à partir de 1693, Jean CURIE (3ème) et Suzanne COLIN, son épouse, avaient abandonné le métier de tanneur à Montbéliard et recherchaient ailleurs une situation nouvelle.

--- A EXINCOURT...

A partir de quand, Jean CURIE (3ème) et son épouse Suzanne COLIN ont-ils quitté Montbéliard pour s'installer à Exincourt ? Il est possible de dire que ce fut entre 1677 (date de la naissance de leur dernier enfant à Montbéliard) et 1705 (date où ils ont été recensés à Exincourt). La date de 1693 se trouve, en effet, dans cette fourchette! Par exemple, le fait que leur fils Henry CURIE (mon ancêtre direct) se soit marié à Etupes en 1693, laisse entendre que son père était déjà installé à Exincourt. De même, leur quatrième enfant, Suzanne CURIE (qui avait 21 ans en 1692) est selon le dénombrement effectué à Exincourt en 1705, alors mariée à Jean GAINAN, d'Exincourt, précisément.

La date de 1693-1695 peut donc vraisemblement être retenue pour établir le moment de l'installation à Exincourt de Jean CURIE (3ème) et de Suzanne COLIN qui auraient été dépossédés de la tannerie de Montbéliard par la vente du 27 mars 1693. Ils avaient, alors, tous les deux 57 ans en 1693. Lors du dénombrement d'Exincourt de 1705, Jean CURIE (3ème) avait 69 ans,et il est mentionné comme "maître d'école". Avait-il un autre métier ? ou bien, comme beaucoup de villageois d'alors, cultivait-il, en outre, un terrain pour subsister ?

Dès 1559, le prince Frédéric 1er de Montbéliard avait promulgué l' "Ordonnance ecclésiastique rendant obligatoire l'Instruction publique pour garçons et filles dans chaque localité de la Principauté. Tout le monde doit savoir lire". Dans les écoles populaires paroissiales, on apprenait aux garçons et aux filles de six à quatorze ans, en français, à lire, à écrire et à compter, ainsi que le catéchisme et le chant des psaumes. Cependant, l'enseignement n'était dispensé que dans les chefs-lieux des paroisses et dans quelques annexes. Les Maîtres d'écoles étaient étroitement surveillés par les pasteurs; et à l'époque, les instituteurs, médiocrement qualifiés et mal rétribués, devaient rechercher un autre métier pour vivre. La guerre de Trente Ans avait anéanti cet essor scolaire, et le duc Léopold Frédéric avait dû avec de faibles moyens après 1660 commencer à reconstruire et à recruter des instituteurs dans tous les villages. Puis, le prince George II (1662-1698) développa cette entreprise de reconstruction. Les maîtres furent alors engagés par les communautés et tenus de chanter à l'église et de sonner les cloches.
L'enseignement donné en français, qui était toujours limité aux rudiments de lecture, d'écriture et de catéchisme, n'était dispensé que de la Saint-Martin aux Rameaux; et les maîtres avaient toujours une autre activité. Le patois était la langue courante des habitants de Montbéliard et de la campagne environnante; et le français, la langue de la Réforme et des élites : des princes et des bourgeois, des pasteurs et des maîtres d'école. Ces deux derniers furent les artisans de sa diffusion.

Ainsi, Jean CURIE (3ème), Maitre d'école à Exincourt et bourgeois de Motbéliard a occupé, semble-t-il, un certain statut social en son temps. Il a vécu sous les règnes successifs des pri ces Léopold Frédéric (1631-1662), Georges II (1662-1669) et la plus grande partie de celui de Léopold-Eberhard (1669-1723). Il dut, comme ses parents, connaître une existence, à la fois riche et agitée. Jusqu'à son mariage à 24 ans, il connut le temps de la détresse; il vécut une bonne moitié de la période troublée de la Guerre de Trente Ans. Il est né en pleine période de peste noire (1625-1637); mais il eut la chance de survivre. Déjà, à 9 ans, il connut la grande famine de 1643, et à 14 ans, la fin de la Guerre de Trente Ans en 1650.

Après son mariage avec Suzanne COLIN, alors maître d'école à Exincourt, il vécut avec les siens sous le règne du prince George II, homme pieux et dévôt, qui en dépit d'une reprise du commerce et de l'artisanat, fut malheureux dans la Principauté. Entre la fin de 1676 et le mois d'août 1679, l'armée française de Louis XIV occupa le Comté, faisant de grands dégâts dans le Pays, incendiant les maisons, saisissant biens et bestiaux; elle désarma et licencia la garnison de Montbéliard, tenta de démlir la Citadelle, se saisit des temples, rétablissant le culte catholique; elle rançonna la population. Dans tout le Pays, la confusion règna : "Nous sommes ici comme des brebis égarées et comme un navire sans pilote. On y vit comme du temps des Juifs, lorsqu'ils n'avaient point de Chef : chacun fait ce que bon lui semble. Il y a deux factions, l'une enfaveur des Français, ce qui cause bien du désordre et du scandale; les prédicateurs, pareillement quand ils fulminent de la Chaire contre les vices en général, sont insultés par ceux qui se croient offencés, tellement que l'on ne s'amende point, faute de chatoy; ... et chez quelques ministres, la vie est si déréglée que c'est un scandale".

A quoi vinrent s'ajouter le 2 mai 1682 un nouveau tremblement de terre entre deux et trois heures du matin à Montbéliard et dans la région avoisinante; et des inondations en janvier 1689, puis à nouveau en 1692.

L'occupation militaire ne prit fin qu'au traité de paix de Ryswick, le 30 octobre 1697 (Jean CURIE,3me, avait alors 61 ans), qui restitua la souveraineté du Comté de Mont béliard aux malheureux duc George II qui devait mourir moins de deux ans plus tard, le && juin 1699. Après le règne de George II, Jean CURIE (3ème) connut quelques-unes des années du règne décrié de son successeur le prince Léopold-Eberhar (1699-1723).

---A ETUPES.

Leurs dernières années, Jean CURIE(3ème) et son épouse Suzanne COLIN les vécurent à Etupes, où ils sont morts l'un et l'autre. A partir du dénombrement de 1713, nous retrouvons, en effet, Jean CURIE (3ème) et Suzanne COLIN, âgés, respectivement de 80 ans et 78 ans à Etupes. Vers la fin de leur vie, ils résidèrement vraisemblablement au foyer de l'un de leurs enfants, peut-être celui d'Henry CURIE, recteur d'école, et de Catherine BOURGOGNE, son épouse. Ils apparaissent dans le dénombrement de l'époque assez démunis matériellement "...ils n'ont rien ramassé, ne sèmeront rien et n'ont aucun bétail; il leur faudrait deux quartes par mois s'ils les avaient....".

Ils décèderont à Etupes, Jean le 8 août 1714 et Suzanne le 26 octobre 1715.

Pierre CURIE descendant de Jean CURIE (3ème du nom)


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